mercredi 24 février 2016

J'ai décidé de m'offrir ce que j'offre aux autres....



Je suis une personne profondément reconnaissante, et j'exprime ma reconnaissance sans réserve. On me trouve parfois un peu étrange car je prends toujours un moment pour remercier les autres, même si je les paie pour le travail qu'ils accomplissent, car ce petit geste en apparence anodin fait toute la différence.

Mais voilà le hic : je ne suis jamais arrivée à éprouver de la reconnaissance envers moi-même, alors que je me suis donnée  sans compter pour les autres depuis des années, souvent à mon propre détriment. J’ai pu me pousser à l'épuisement, ou négliger mes propres envies ou projets, si des gens que j'aime ont besoin de moi, parce que j'ai toujours cette impression de ne jamais en faire assez, ou de ne pas m’autoriser à dire « non » . Et même si j’aime aider les autres, j'attends toujours cette reconnaissance que j'accorde aux autres, et qui ne vient à peu près jamais pour moi... ou que je ne vois pas. C'est toujours comme si tout ce que je faisais pour les autres – même si je m'épuise à la tâche – était simplement normal. Je n’ai jamais oublié de souhaiter un anniversaire, de valoriser les réussites des autres, de les encourager à avancer, de les rassurer ou les consoler : chez moi c’est une habitude. Des gestes qui ne reçoivent pas toujours un simple « merci ». Or, ce n'est pas normal, car j'y mets tout mon cœur, et j'attends la reconnaissance en vain. Au fil des années, la frustration s'est accumulée, je n’en pouvais plus et bien que je l’aie parfois exprimée pour soulager la pression, rien n'a changé. Ma soif de reconnaissance a pris des proportions alarmantes, me poussant à en faire toujours plus, en me sentant de plus en plus redevable, inadéquate, incapable de satisfaire les attentes des autres. J'en suis arrivée à ne plus avoir envie de rien, à me dire Si personne n'est jamais content de ce que je fais, tant pis, je ne ferai plus rien.

Un jour, je venais d'accomplir quelque chose d'extrêmement difficile avec l'aide d'une amie et, naturellement, je me suis empressée de la remercier de tout mon être. Elle m'a répondu Mais c'est toi qu'il faut remercier,! Je t'ai seulement aidée, c'est toi qui as fait l'essentiel ! Voyant qu'elle avait raison, je me suis remerciée intérieurement... et j'ai éclaté en sanglots. Je réalisais que je venais de me remercier pour la première fois de ma vie, et ces larmes qui coulaient, soulageaient la frustration et la peine de toutes ces années passées à attendre une reconnaissance extérieure qui ne venait jamais, parce que je devais d'abord me reconnaître moi-même.

J'ai donc décidé de m'offrir ce que j'offre aux autres. Étant de ceux qui écrivent toujours un petit mot de remerciement à la suite d’une belle discussion enrichissante ou d’une soirée agréable passée entre amis, je me suis dit que je pourrais très bien m'écrire à moi-même pour me remercier.

Je me suis installée devant mon ordinateur pour m'écrire un très beau message, comme ceux que j'envoie pour remercier quelqu’un  qui m'est cher, et je l'ai signé «Ta meilleure amie». Ça peut sembler étrange ou inefficace, puisque je l'écrivais moi-même et que je savais ce que j'allais recevoir, mais l'énergie qu'on insuffle dans un geste qu'on pose est perçue autrement par celui qui la reçoit. Le fait est que lorsque j'ai lu le message, plus tard en soirée, je l'ai vraiment ressenti comme s'il m'arrivait de l'extérieur. Et il m'a touchée profondément. J'ai ressenti une telle joie ! Je recevais comme un souffle d'air frais et une bouffée d'énergie toute neuve. J'ai compris que je devais en faire une habitude. Qu'il fallait que ça devienne aussi normal, de me remercier, que de remercier quelqu'un d'autre.

Il n'est pas si facile d'installer une habitude, lorsqu'on a passé toute sa vie à faire le contraire… Mais à la lumière de ce que j'ai ressenti, je sais que c'est une clé essentielle, et je trouve merveilleux de l’avoir découverte ! Je sais aussi que dans quelque temps, il sera naturel pour moi de me remercier. La reconnaissance que j'attends depuis toutes ces années doit d'abord venir de moi.